Petit billet sur un ton polémique (mais léger)... à force de parler de tous les segments économiques qui touchent de près ou de loin au domaine de la musique, on est en droit de se poser la question : qui peut bien encore vouloir mettre des sous dans la musique? La situation ressemble un peu à celle de l'industrie de l'acier au le début des années 70... après moultes de plans sociaux chez Essilor-Sacilor, et d'aussi nombreuses tentatives de rebond sans succès, l'Etat Français avait finalement rendu les armes, initiant l'une des plus cruelles saignés au coeur du plus grand bassin industriel français.
La musique n'a cessé de perdre des emplois au cours des dix dernières années : à titre indicatif, EMI est passé de 450 à moins de 200 salariés sans pour autant que l'on puisse vraiment dire qu'ils soient sortis d'affaire. le résultat cumulé des profit des 4 majors restantes est négatif sur cette période et de nombreux autres secteurs d'activités proches -la radio par exemple- sont passés de situation de rentabilité élevée à profits chancelants, voir pertes trop régulières.
Les investissement n'ont pourtant pas manqués. Au début des années 2000, avant le crack, Vivendi met la main sur Universal, à la stupéfaction de nombreu
x acteurs. Seagram (Edgar Bronfman) ne s'oppose pas à une opération qui lui permet de devenir un actionnaire significatif du nouvel ensemble. Il ne sait pas encore que Jean-Marie Messier est peut être un visionnaire, mais avec au moins quinze ans d'avance. Vivendi, par ailleurs actionnaire majoritaire de SFR, est rapidement rejoint par les autres opérateurs de télécom. Orange renifle de très près le secteur pour n'y rien investir... mais de peu. SFR quand à lui décrète la musique comme un axe stratégique pour fidéliser et recruter de nouveaux consommateurs. Quelques années durant, ils tiendront d'ailleurs la seconde marche du podium, juste derrière Itunes. Une performance qui aura toutefois nécessité des investissements très significatifs, dont l'un des bénéficiaires n'est autre que la société Musiwave.
Mais début 2000, c'est aussi le temps des fonds d'investissement. De nombreux projets sont initiés dans le domaine de la musique. Francemp3, Musiwave, Musicme... Les investisseurs pensent que le marché du numérique va exploser ; peu d'entre eux font le pari du mobile. La DRM est perçu comme un enjeu d'avenir. Ils déchanteront peu à peu, et très rares furent ceux qui parvinrent, ne serait-ce qu'à adosser leurs projets.
L'espace se vide peu à peu. SFR continue bien à investir, une participation dans le showcase (une boite trop petite pour faire de grands concerts et trop grande pour en faire une boite...) mais dès 2005, le coeur n'y est plus vraiment.
Cette année là, de très nombreuses opérations se débouclent, rarement avec profit pour les investisseurs.
2006 se révèle une très forte année pour le venture (des records historiques sont enregistrés) mais une mauvaise année pour la musique ; en France, très peu d'investissement y sont concrétisés.
Puis, à partir de 2007, une nouvelle vague arrive. Believe est financé et rapidement, fonctionne mieux que prévu, et en 2008 c'est Lagardère qui prend -confidentiellement- une participation très significative dans Because (on parle de 40%) : c'est le grand écard entre la vente de missiles -avec EADS- d'un coté et les paillettes de l'autre.
Enfin, vient la vague de la musique streamée. Et après les business angels, des fonds s'intéressent à nouveau à la musique ; Deezer, Jiwa et consors se développent rapidement. Les investisseurs flairent la bonne affaire, s'imaginant sortis sous deux ans. On peut prédire sans grand risque qu'il faudra probablement compter le double ou le triple avant que ce modèle puisse être rentable et pereine.
En dehors de ces derniers, le marché s'est considérablement assagit depuis deux ans. Plus de deal en capital risque et encore moins dans le monde traditionnel qui, il est vrai n'a cessé de s'enfoncer.
Sous-investissement? désafection des consommateurs? Piraterie? Les réponses divergent, mais il est certain qu'il n'y a plus beaucoup de monde pour y aller tant le rendement sur fonds propre paraît négatif.
Il n'en reste pas moins vrai que nous ne cesserons jamais d'écouter de la musique et que toutes les études le montrent, l'offre ultime -y compris Itunes- n'existe pas encore. Par essence, la détection du point bas est un art ou une science difficile, mais il n'est pas impossible que l'on soit arrivé à un instant de renversement. il faudra certes attendre plusieurs années pour en juger, cependant, la probabilité que de marché s'en sorte au travers d'un redoublement de l'innovation ne nous a jamais autant semblé concrète que ces derniers temps.
4 commentaires:
et la SNCF?
Essilor-Sacilor ? Le fabricant de lunettes en acier trempé ? :-)
> la probabilité que de marché s'en sorte au
> travers d'un redoublement de l'innovation
Dans toutes ces discussions le mot "innovation" revient sans cesse. Et il ne désigne jamais une innovation au niveau musical mais toujours au niveau de la technique de diffusion. Or la musique enregistrée est là pour être écouté, peu importe si elle sort d'un disque vinyl, un CD, d'une radio, ou d'un lecteur mp3. Vous pouvez changer le look de tous ces gadgets, ajouter des couleurs, un mixeur de fréquences, donner des nouveaux noms "Deezer", "Jiwa", Spotify, mais l'essentiel à la base reste toujours la création musicale.
Souvent dans ces débats on peut lire des phrases comme "les exigences financières des ayant droits sont responsables de l'échec de nouveaux acteurs comme Jiwa ou de Deezer ; il ne leur reste pas assez d'argent pour investir dans l'innovation". Mais quelle innovation ? Une nouveauté de diffusion qui deux ans plus tard sera déjà obsolète car une boîte en Suède ou en Corée (qui en réalité s'en fout de la musique et ne s'intéresse qu'aux Google AdSenses) a dévéloppé un nouveau logiciel ? Je comprends toute à fait les ayant droits. Pourquoi braderaient-ils leur catalogue ? Les nouveaux acteurs pourraient investir eux-même dans la création musicale...
C'est simple. Le gaz plus 9%, Gadonnex demande 20% en 3 ans, la santé, la retraite, les BRICs autonomes.
Ma fille apprend le chinois elle pourra immigrer en Chine quand il le faudra.
Bref le monde évolue, encore heureux.
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