Un débat récurrent et fortement lié à internet consiste à définir s'il convient de parler de contenu ou de culture. Il est en effet assez amusant ou désespérant -au choix- de constater que l'on peut souvent dire à peu près la même chose, tout en changeant assez largement la substance de ce que l'on exprime... Pas clair?
- "Notre offre de contenu est particulièrement riche est diversifiée"
ou
- "Notre offre culturelle est particulièrement riche et diversifiée"
Dans le premier cas, vous comprenez "nous avons beaucoup de contenu et ça va nous rapporter beaucoup d'argent", dans le second vous comprenez plus ou moins "nous nous sommes investis pour disposer d'un offre de qualité, de sorte à ce que cela épanouisse les gens".
Depuis que le web existe, on ne peut cacher que c'est un débat qui a tendance à cristalliser les incompréhensions et à créer une certaine amertume. D'un coté, ceux qui évoquent les contenus sont souvent perçus -parfois à juste titre- comme des marchands de salade qui offriraient tout aussi bien des spagettis en boite que de la musique ou des films ; de l'autre les représentants de l'offre culturel sont perçus -souvent par les premiers- comme des intellectuels, incapable de sortir de leurs canons esthétiques, et pas plus capables d'innover pour transcender internet avec ce dont ils disposent...
Et il faut avouer que ce débat n'a pas beaucoup fait avancer la cause de la qualité.
Plus de vingt ans après l'invention du web, force est de reconnaitre que ce qui mine la culture sur internet est la faible qualité de ce qu'on y trouve. Nous savons combien cette affirmation est à même de nous assimilier à des penseurs réactionnaires. Cependant et en toute franchise, nous pensons également que ce n'est pas faux de reconnaitre qu'aucune superproduction n'a jamais été pensée pour l'internet, qu'il s'agisse de musique, d'opéra, de concert, ou même de film, de peinture, ou de ce que l'on veut, en fait.
Internet est un espace de déclinaison sans fin, on y retrouve ce qui a déjà été ailleurs, sur la télévision, dans les bacs des disquaires (de moins en moins), au cinéma.
C'est un symptôme qui démontre qu'internet n'est pas un lieu perçu comme qualitatif ; tout au moins en ce qui concerne les contenus culturels. Beaucoup ont expliqué cela par le fait qu'il est difficile de s'y faire payer pour ses créations, où alors d'une façon qui déprécie la qualité de ce qu'on y propose ; la publicité devient envahissante et dégrade en effet l'expérience qu'on y rencontre. Mais est-ce l'unique et la plus complète excuse?
En ce qui nous concerne, et c'est un point de vu qui est largement contestable, nous pensons que l'espace Internet ne pourra être exploité à plein par de vrais artistes que lorsqu'il aura été clairement conçu par ces artistes comme un plan d'expression nouveau, dans lequel la déclinaison est déjà un échec. En d'autres termes, il faut renouveler les contenus et les penser au sein du Net. Il faut créer de nouvelles expériences avec un objectif qui privilégie la qualité. On en est loin. Et sans doute faudra t'il associer de vrais artistes avec de vrais entrepreneurs. Sans doute faudra t'il que James Cameron, ou Pierre Boulez s'associent avec des geeks de génie, et sans doute cela prendra t'il encore des années.